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Une histoire de jeu de rôle…

Doudous & Dentiers : Le début du cauchemar

Le soleil venait de se coucher sur l’Institut d’Accueil de Jour Pédiatrique et Gériatrique Saint Vincent. Dans une chambre du rez-de-chaussée, Charlie, Théophile et Dylan regardaient Victor sautiller sur son lit. Depuis quatre jours, date approximative de leur arrivée à tous, celui-ci ne cessait de rigoler et de se vanter, malgré le trou sur le devant de sa dentition. Aujourd’hui, ce trou s’était agrandit, et, entre deux grincements de ressort rouillé de son lit fatigué, il répétait qu’il avait un plan pour attraper la Petite Souris. Il brandissait sa dent, comme une pépite nacrée remplie de pouvoir : « La P’tite Souris pourra pas résister, elle voudra ma dent pour son nid ! Moi j’vais pas dormir ! J’ai chipé du café à la cafétéria, un vieux l’avait pas fini, j’suis super en forme ! Vous allez voir ! Demain je serai le chasseur qui a attrapé la P’tite Souris ! »

La petite de cinq ans et son frère de 6 ans, qui partageaient leur chambre, impressionnés, le dévoraient des yeux, la morve au nez. Charlie, Théophile et Dylan, en revanche, étaient du même âge que Victor et ne semblaient pas impressionnés. Théophile, l’intello à lunettes et dents de lapin, se moquait de lui, prétextant que la Petite Souris était comme le Père Noël, une invention des parents. Dylan, le petit gros agressif et fougueux, aurait bien voulu attraper Victor et lui faire avaler sa dent ! Charlie, le chef de bande un peu paumé, préférait regarder cela de loin, assis sur son lit.

Un des surveillants ouvrit la porte pour leur rappeler d’aller se coucher, et dans un dernier craquement de literie épuisée, Victor se mit sous les couvertures, tout habillé. Les autres se mirent en pyjama et se couchèrent à leur tour. La journée avait été assez remplie, et Victor avait fini de les fatiguer, aussi s’endormirent-ils tous assez rapidement.

Soudain, un hurlement les réveilla. Regardant autour d’eux, ils remarquèrent que la porte de leur dortoir était entrouverte. Victor, quant à lui, n’était plus dans son lit. Avait-il vraiment trouvé la Petite Souris ? Persuadé que c’était bien son cri qu’ils avaient entendu, la bande de Charlie sortit de la chambre, laissant les plus petits, terrifiés sous leurs couvertures. Ne sachant pas trop de quel côté venait le cri, ils s’engagèrent d’un côté du couloir au hasard. Il y faisait très sombre, puisque les lampes ne fonctionnaient pas la nuit afin de faire des économies, d’après la direction de l’Institut. Seule la lumière de la Lune filtrait entre les hautes fenêtres du manoir, aux embranchements des couloirs et vers les escaliers. Avançant prudemment, sans bruit grâce à leurs chaussons, les enfants entendaient grattements, grondements et halètements, dans l’obscurité malsaine qu’offrait le manoir. Charlie regrettait de ne pas connaître d’Ancien pour les rassurer et leur venir en aide. Il s’était toujours bien entendu avec les vieux, il les trouvait réconfortants et bienveillants.

Alors, ils entendirent un enfant qui appelait à l’aide d’une voix étouffée, un peu plus loin. Les gémissements venaient d’une pièce éclairée dont la porte était entrouverte. Risquant un œil à l’intérieur, ils découvrirent un garçon bâillonné et attaché à un lit avec des lanières de cuir, au milieu d’un étrange croisement entre l’infirmerie scolaire et le laboratoire d’un savant fou. L’échelle Monoyer et ses lettres de plus en plus petites faisait face à la représentation médicale bien trop précise d’un homme difforme. Les boîtes de Doliprane et d’Aspirine étaient accolées à des bocaux remplis de formol et d’organes. Au loin dans le couloir se firent alors entendre des bruits de pas. Théophile stressait et voulait vite partir, mais Charlie entreprit de défaire les liens du garçon inconnu. Aidé de ses amis, il parvint finalement à le faire alors que les pas étaient tout proches. L’enfant, terrorisé, s’enfuit sans demander son reste, et la bande de Charlie n’eut pas le temps de le suivre qu’un docteur surgit à la porte. Celui-ci les fusilla du regard, furieux, et leur cria dessus en allemand. Théophile et Charlie comprirent que le Docteur Totenkopf, déjà peu rassurant de jour et plus inquiétant encore cette nuit, avec sa blouse salie de sang et de tâches verdâtres, et sa seringue vert fluo à la main, les insultait copieusement. Charlie tenta de lui demander ce que faisait un enfant ici. « Ce ne sont pas fos affaires, verdammtes kinder, mais c’était chuste pour lui administrer un faccin. » Face aux interrogations sur l’étrangeté de devoir attacher un enfant pour cela, celui-ci répondit que le garçon avait peur des piqures, et les mit à la porte de l’infirmerie.

De nouveau au milieu du couloir sinistre, les Gamins entendaient les grondements se rapprocher. Ils continuèrent toutefois leur route, et croisèrent Madame Lafouine. Cette petite vieille, arrivée deux semaines avant eux, était déjà connue comme une commère bavarde. En peignoir et bigoudis sur la tête, elle se tenait dans l’entrebâillement de la porte de sa chambre. Des ronflements de vieillardes filtraient depuis l’intérieur de la pièce. Les enfants décident alors de lui demander si elle n’aurait pas vu Victor passer dans ce couloir :
– Ah, Victor, oui… Il était beau et tellement séduisant… Nous devions nous marier, vous savez, mais… mais il y a eu la guerre et…
– Non, mais on parle de Victor qui suivait la Petite Souris…
– C’est vrai qu’il y avait des souris dans la grange, mais c’était tellement romantique. Nous y allions souvent, vous savez, avant la guerre… Ah, Victor, si seulement…
Comprenant qu’elle radotait, ils n’insistèrent pas et reprirent leur route, Charlie s’excusant de ne pouvoir rester plus longtemps. La porte de la vieille claqua derrière eux. Les grattements et grondements se rapprochaient…

Signé Dameg

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